Une nouvelle méthode de comptabilisation de la richesse inclut désormais les dépenses de R&D et la création intellectuelle.
La contribution de la créativité artistique et des activités intellectuelles de recherche à la création de richesse a été jusqu'ici sous-évaluée. Ce n'est pas un collectif de philosophes qui le dit, mais le bureau d'analyse économique américain (BEA), l'équivalent de l'Insee. Désormais, le PIB américain est calculé selon une nouvelle méthodologie qui doit mieux refléter la production de richesse dans une « économie de la connaissance » où les idées, les œuvres audiovisuelles et les médicaments doivent être mieux valorisés.
Un exercice délicat
Le changement intervient à la faveur d'une revue quinquennale du mode de calcul. Le BEA a du coup procédé à de nouvelles estimations du PIB américain depuis 1929. Les dépenses en recherche-développement, en divertissement, en création artistique, sont maintenant comptabilisées comme des investissements. Jusqu'ici, les fonds affectés à la recherche-développement étaient considérés comme des coûts, seul le produit final auquel aboutissaient les recherches était comptabilisé comme création de richesse. L'exercice est délicat, car il implique de déterminer quels produits culturels génèrent des revenus sur de longues périodes (un film comme Star Wars, qui continue à alimenter des flux de revenus de millions de dollars encore aujourd'hui, des décennies après sa sortie) et lesquels perdent leur valeur très rapidement (malheureusement pour l'orgueil des journalistes, la plupart des articles d'information). Le coût de production des premiers sera inclus dans le PIB. Le BEA a aussi modifié la façon dont il comptabilise les transferts de propriété et les pensions. L'impact total de ces nouvelles méthodologies a dopé le PIB américain de 2012 de quelque 559,8 milliards de dollars (+3,5 %), pour la plus grande partie en raison des dépenses de recherche-développement (3.96,7 milliards de dollars).
Cette hausse du dénominateur va avoir un effet mécanique sur des indicateurs comme le poids des dépenses publiques rapporté au PIB national ou le poids de la dette fédérale. Cela dit, comme le résume Neal Soss, le chef économiste du Crédit Suisse à New York, « si vous pesez quelque chose en livres ou en kilos, vous n'avez pas changé sa masse. Il s'agit de la même économie, on ne fait qu'appliquer une convention différente pour la mesurer. »
Les Etats-Unis sont l'un des tout premiers pays à appliquer des standards internationaux de comptabilité nationale fixés par l'ONU. L'Europe doit suivre dans quelques années.
K. De M., Les Echos